Le « Digital Services Act » (DSA), règlement européen entré en vigueur en août 2023 pour certaines plateformes et élargi à l’ensemble des intermédiaires en ligne en février 2024, vise à réguler les activités numériques pour assurer la sécurité des utilisateurs/trices, lutter contre les contenus illégaux et garantir un environnement plus équitable sur internet. Un an après, l’avocat spécialisé, Alan Walter, dresse un bilan des avancées et défis de cette législation. On fait le point dans notre nouvelle revue de presse.

Digital services act

Objectifs et mesures phares du DSA

Le DSA vise à encadrer plusieurs aspects de la gestion des plateformes :

– Lutte contre les contenus illicites : le règlement impose des mécanismes de signalement et de suppression rapide des contenus illégaux, incluant un nouveau système de « signaleurs de confiance ».

– Transparence des processus : les plateformes doivent être transparentes quant à la modération, la gestion des réclamations, et au fonctionnement de leurs algorithmes.

– Publicité ciblée et protection des mineurs : interdiction de la publicité ciblée pour les mineurs et régulation contre la désinformation et les manipulations électorales.

– Contrôle des vendeurs en ligne : les plateformes de e-commerce doivent vérifier l’identité de leurs vendeurs, une procédure « Know Your Customer » (KYC) similaire à celle imposée aux banques.

Rôle de l’Arcom : le régulateur français du DSA

L’Arcom (Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique) a été désignée comme l’autorité française chargée de faire respecter le DSA. À l’instar de la CNIL pour le RGPD, elle supervise les plateformes et dispose d’un pouvoir de sanction pour les contrevenant(e)s. Cette mission est néanmoins confrontée à des ressources limitées, ce qui l’amène à concentrer ses efforts sur les grandes plateformes comme Google, Meta, Twitter ou Zalando.

Une première année de « round d’observation »

Alan Walter décrit cette première année de mise en œuvre comme une période d’ajustement. Les plateformes ont globalement tenté de se conformer aux nouvelles exigences, bien que le processus reste inachevé. La Commission européenne a déjà surveillé des actions, comme la désactivation de CrowdTangle par Meta, un outil de transparence des informations, jugée non conforme au DSA. Si aucune sanction majeure n’a encore été imposée, des enquêtes de l’Arcom pourraient se développer dans les mois à venir.

Coopération des plateformes : entre volonté d’adaptation et réticences

Les plateformes ont, dans une certaine mesure, intégré les exigences du DSA, mais non sans difficulté. Les adaptations requises impliquent des ressources humaines et financières significatives pour des ajustements non rentables. A.Walter souligne que cette réticence rappelle les débuts du RGPD (Règlement général sur la protection des données), où les entreprises hésitaient également à se conformer à des régulations jugées contraignantes.

Le DSA prévoit des sanctions sévères, incluant l’interdiction d’accès à une plateforme en Europe pour non-respect des règles, une option plus dissuasive que les amendes du RGPD. Cependant, une exclusion totale reste improbable, même si elle demeure possible en cas de non-conformité majeure.

Perspectives pour l’avenir : un texte adaptable face à l’évolution rapide du numérique

Le DSA reflète le défi de réguler un environnement technologique en constante évolution. Pour assurer la durabilité des textes de loi, il faut un équilibre entre précision et flexibilité. Une rédaction trop précise risque une obsolescence rapide, alors qu’une approche plus large permettrait une application à plus long terme, bien que sujette à interprétation.

En somme, cette première année du DSA a été marquée par des efforts d’adaptation des plateformes et une surveillance progressive. Le véritable test viendra avec les premières enquêtes de l’Arcom et l’évolution de la législation face aux innovations numériques.

Julia Rodriguez