Les médecines alternatives sont de plus en plus appréciées et recherchées chez les Français(es) et ailleurs, on vous en a déjà parlé ici. De plus en plus de scientifiques se tournent également vers elles afin de trouver des solutions, comme face à la résistance aux antibiotiques. Outre-Manche, des traitements médiévaux côtoient les dernières technologies, on vous en parle dans notre nouvel article.
Entre 2007 et 2019, le nombre de patient(e)s du NHS (la Sécurité sociale britannique) à bénéficier d’une asticothérapie a augmenté de 47%. L’asticothérapie qu’est-ce que c’est ? Certain(e)s universitaires pensent que la pratique remonte aux tribus aborigènes préhistoriques qui recouraient aux asticots pour traiter les blessé(e)s et nettoyer leurs plaies. A l’époque des guerres napoléoniennes, de la guerre de Sécession aux Etats-Unis ou encore pendant la Première Guerre mondiale, ces vers ont permis de soigner de nombreux soldats. Aujourd’hui, devant l’essor de la résistance antibiotique, les asticots constituent un soin de substitution à la médecine moderne. En effet, ils permettent de combattre l’infection en consommant directement les tissus nécrosés et les bactéries. Ronald Sherman, à l’origine de l’utilisation par la médecine moderne des asticots, ajoute néanmoins qu’« un tabou empêche les gens de recourir à cette technique. Mais pour nombre de praticiens, dès le premier essai – même en dernier recours -, ils voient les résultats ». Des études ont fini de prouver que l’utilisation d’asticots réduisait la superficie d’une plaie et permettait une cicatrisation plus rapide que les pansements classiques. L’asticothérapie est admise par le NHS depuis 2004.
Des remèdes existant depuis des millénaires
Au pays de Galles, un élevage fournit, depuis de nombreuses années, 60 000 sangsues médicinales au NHS et à d’autres prestataires de santé. Même si pour nombre d’entre nous, ces techniques renvoient au sombres « saignées » du Moyen Âge, les sangsues sont en réalité des auxiliaires de santé depuis des siècles. Elles libèrent des substances chimiques qui fluidifient le sang et inhibent la formation de caillots empêchant ainsi la nécrose des tissus.
De l’autre côté de la méditerranée, en Egypte, le miel était utilisé pour traiter les blessures depuis des milliers d’années. Des pansements au miel de qualité médicale sont ainsi parfois employés outre-Manche. Des scientifiques de l’université de Manchester vont même plus loin et préconisent le miel en remplacement des médicaments antibactériens.
Quand recherche scientifique et historique travaillent ensemble
Christina Lee est cofondatrice de l’équipe AncientBiotics à l’université de Nottingham. Créé en 2013, ce groupe de chercheur(e)s est composé de médiévistes et de scientifiques qui étudient l’efficacité de remèdes oubliés de longue date. Elle souligne que les travaux de l’équipe ne sont pas une médecine alternative et ne visent pas à la réalisation de ces remèdes chez soi. L’idée ici est plutôt de chercher des remèdes qui ont une bonne base scientifique, susceptibles d’inspirer la découverte de médicaments modernes. Premier succès en 2015 : AncientBiotics met au jour un remède issu du Bald’s Leechbook, un traité médical datant du Xe siècle, permettant de traiter des plaies. Ce mélange composé d’Allium (genre auquel appartiennent l’ail ou l’oignon), de vin et de bile bovine a ensuite été testé sur des souris par des chercheur(e)s américains. Les résultats sont bluffants : le mélange tue 90% du staphylocoque doré sur les plaies.
En août 2002, les bibliothèques de l’université de Cambridge ont lancé le projet « Curious Cures » (remarquables remèdes) afin de numériser, sur deux ans, 8 000 recettes médicales du Moyen Âge. Cela permettra de faciliter l’accès à ce savoir ancestral en rendant la recherche moins chronophage. A l’avenir, ces remèdes oubliés pourraient bien se généraliser. Même si aujourd’hui les tabous subsistent, la communauté scientifique semble davantage attentive à ces voies nouvelles.