Faire appel au vécu des usagers et de leurs proches pour identifier les axes d’amélioration du parcours de santé, c’est cela l’expérience patient. Et ce concept, encore relativement récent en France, ne cesse de démontrer ses bénéfices. Explications.
L’expérience patient se définit comme tout ce que vit et perçoit une personne lorsqu’elle est confrontée au système de santé. Plus précisément, « elle regroupe l’ensemble des interactions et des situations vécues par une personne ou son entourage au cours de son parcours de santé », explique Amah Kouevi, directeur de l’Institut français de l’expérience patient (Ifep) avant de préciser : « Ces interactions sont façonnées à la fois par l’organisation de ce parcours mais aussi par l’histoire de vie de la personne concernée. »
Questionnaire, observation, entretien…
L’expérience patient peut être recueillie par le biais d’un questionnaire. « En France, les établissements de santé en utilisent un qui s’appelle e-satis et qui permet de mesurer la satisfaction et l’expérience des patients », indique le directeur de l’Ifep. Toutefois, il existe une subtilité entre ces deux termes. « La satisfaction peut varier notamment en fonction du niveau d’attente, constate Amah Kouevi. Si l’on demande à une personne qui vient de subir une opération si elle est satisfaite de la prise en charge de sa douleur, nous disposerons d’une information utile mais nous ne pourrons pas savoir exactement ce qu’il s’est passé. En revanche, si on lui demande si quelqu’un, au cours de son hospitalisation, a discuté avec elle de la prise en charge de la douleur, on pourra en déduire qu’une bonne pratique est bien mise en œuvre. L’expérience précède la satisfaction ; c’est pour cela qu’il est important de la recueillir pour mieux comprendre le vécu à la fois sur le ressenti et sur les faits. »
Des observations peuvent aussi être réalisées. « On s’installe par exemple dans une salle d’attente pour noter ce qu’il s’y passe : quel est le temps d’attente, quand vient-on parler aux patients, comment s’adresse-t-on à eux, ce qu’on leur demande… », illustre le directeur de l’Ifep.
Enfin, des entretiens permettent d’entendre le patient et de détecter, dans son récit, les points à améliorer et ceux, positifs, à généraliser. « Cette modalité est extrêmement instructive car elle permet de découvrir ce qui importe le plus au patient, ce que les professionnels ne perçoivent pas toujours », ajoute Amah Kouevi.
Une valeur ajoutée pour les professionnels et les patients
Ce recueil de données nécessite un engagement de la part des acteurs de la santé et des freins demeurent. « Prendre en compte l’expérience patient peut parfois être pris comme une injonction supplémentaire par un personnel déjà débordé, observe Amah Kouevi. Il faut alors expliquer qu’elle fait au contraire gagner du temps et qu’elle redonne du sens au travail. Elle permet de se reconnecter à l’autre et de retrouver l’intérêt de son métier de soignant. »
Du côté des patients, les avantages sont également nombreux. « L’expérience patient participe au confort et au bien-être puisque l’usager, qui peut parfois être dans une position de vulnérabilité, se sent écouté et entendu, estime le directeur de l’Ifep. Mais surtout, elle va avoir un effet positif sur sa santé car elle va aussi améliorer la qualité des soins. »
Un Institut français de l’expérience patient
Créé en 2016, l’Institut français de l’expérience patient (Ifep) a pour mission de faire de l’expérience des patients un levier d’amélioration du système de santé. Pour cela, il informe, propose des formations et anime une communauté. L’Ifep est une association, ce qui permet aux établissements, entreprises et institutions, comme aux individus, d’en devenir membre et de participer ainsi aux réflexions.
Pour en savoir plus : Experiencepatient.fr.
Léa Vandeputte