Fête des mères, Saint-Valentin, anniversaires : rien de mieux que des fleurs pour témoigner son amour, son amitié ou dire merci. Sauf que si les fleurs ne sont pas de saison, elles font des kilomètres en avion pour atterrir dans votre salon.
« Dites-le avec des fleurs ». La formule est toujours de circonstance mais beaucoup s’interrogent : d’où peuvent venir ces merveilleuses roses rouges fraîchement écloses en février ? Sachant que les roses poussent, normalement, entre mai et novembre sous nos latitudes, si elles ne sont pas de saison, c’est donc qu’il a fallu les faire venir d’ailleurs. Les roses vendues en hiver dans l’Hexagone, et qui représentent près de la moitié des achats de fleurs des Français, ont effectivement été acheminées depuis des pays lointains comme le Kenya, l’Éthiopie, l’Équateur ou la Chine. Bien que leur origine ne soit jamais mentionnée, en France, neuf fleurs sur dix sont importées.
Beautés vénéneuses
Les réglementations environnementales des pays en voie de développement dans lesquels ces fleurs sont la plupart du temps produites sont beaucoup moins strictes que celles en vigueur dans l’Union européenne (UE), et en particulier en France. Dans un article intitulé Roses, des bouquets très chimiques, paru en février 2017, le magazine 60 Millions de consommateurs révélait que tous les bouquets de roses en vente dans les grandes enseignes de fleuristes contenaient des substances chimiques. « Au total, nous avons identifié 49 molécules différentes, dont des substances très persistantes dans l’environnement et des produits dangereux pour les abeilles (chlorothalonil, acétamipride, méthamidophos…) », précisaient les auteurs de l’étude. La présence de pesticides dans les fleurs d’importation ne constitue pas en soi un problème de santé publique, puisque l’exposition est très faible et qu’« il n’y a pas de risque avéré pour les petits enfants, les chats et chiens qui s’aviseraient de mâchouiller des pétales », indiquaient-ils, avant d’ajouter : « mais tous les pesticides, quels qu’ils soient, dégradent l’environnement en raison de leur persistance dans les eaux, et concourent à nous exposer à un cocktail dont les impacts sont connus : baisse de la fertilité, problèmes de développement chez les enfants, développement de cancers… »
Malaise social
Avant de pouvoir disposer de jolies fleurs dans leur vase, il a bien fallu les faire pousser, ce qui pose une question d’ordre sanitaire. Les petites mains qui les ont cultivées et cueillies ont-elles mis leur santé en danger ? Le reportage paru dans le n° 454 du magazine Géo(décembre 2016), illustrait bien le problème. Il montrait en effet les conditions déplorables, à la fois pour la santé des cultivatrices et pour l’environnement, qu’entraînait la culture intensive des roses le long des rives du lac Naivasha. L’utilisation massive des engrais et pesticides a pollué durablement les eaux, dont le niveau baisse d’année en année en raison de pompages intensifs. Le site, autrefois riche en biodiversité, est aujourd’hui dévasté. De plus, les ouvrières y travaillent sept jours sur sept, cueillant et empaquetant les fleurs à un rythme effréné et pour un salaire de misère, inférieur au Smic kenyan. Pour les préserver du soleil et des intempéries, les fleurs sont cultivées hors-sol, sous d’immenses serres. Une fois conditionnées, elles sont ensuite placées en chambre froide avant d’être livrées par avion quarante-huit heures plus tard en Hollande, la plaque tournante du commerce floral. Le prix payé par la nature et les conséquences sociales et sanitaires sont immenses. « La rose du Kenya est souvent vendue en supermarché, pour un prix d’environ un euro pièce, souligne Géo. Le coût de revient de la fleur coupée, à la sortie de la plantation africaine, oscille, lui, entre 4 et 8 centimes d’euros seulement ».
« Consommer local »
Vous pouvez éventuellement trouver des roses produites en France en hiver, mais ces dernières auront forcément poussé sous des serres chauffées et éclairées, et donc énergivores. Préférez donc des variétés de saison, comme les renoncules, les jonquilles, le mimosa ou les anémones, qui poussent en hiver ou dès le début du printemps. Renseignez-vous auprès de votre fleuriste pour connaître leur provenance et éviter ainsi d’offrir un « cadeau empoisonné ».