Relativement méconnue, la neurostimulation médullaire permet de réduire certaines douleurs chroniques grâce à la modulation de la transmission du message douloureux. Quelles sont ses indications et son mode de fonctionnement ? Les réponses du Dr Hayat Belaid, neurochirurgien à l’Hôpital Fondation Adolphe de Rothschild.
Le 18 octobre a eu lieu la journée mondiale contre les douleurs chroniques. Certaines d’entre elles sont difficiles à vivre au quotidien mais elle peuvent être réduites grâce à la neurostimulation médullaire. Cette technique est pratiquée depuis une vingtaine d’années et consiste à agir directement sur les structures impliquées dans la transmission du message douloureux.
« La neurostimulation médullaire est l’une des techniques de neuromodulation. Elle consiste à utiliser une impulsion électrique pour modifier le message transmis au cerveau », résume le Dr Hayat Belaid, neurochirurgien à l’Hôpital Fondation Adolphe de Rothschild. « Le message douloureux est transmis de la périphérie vers le cerveau mais il existe aussi une modulation du cerveau vers la périphérie. La douleur chronique est définie par la persistance d’une douleur au-delà de ce qui est habituel et se traduit au niveau du système nerveux par une hyperactivation des voies qui transmettent la douleur. L’objectif de la neurostimulation médullaire est donc d’atténuer cette hypersensibilisation. »
Quel est le principe?
« La technique repose sur une électrode placée en regard de la moelle épinière dans l’espace épidural (qui se situe entre la dure-mère et la vertèbre). Elle est reliée à un générateur de stimulation positionné sous la peau, au niveau de l’abdomen ou de la fesse. C’est ce générateur qui donne l’impulsion électrique pour moduler les voies de transmission de la douleur et atténuer cette sensation», détaille le Dr Belaid. La neurostimulation médullaire nécessite un acte chirurgical qui peut être effectué grâce à deux techniques : l’approche chirurgicale par abord direct ou l’approche percutanée. Elle comprend deux étapes avec une phase de test clinique dans l’intervalle. « Pendant environ une semaine, l’électrode est reliée à des petites extensions externalisées au niveau de la peau qui sont connectées à un boîtier externe. Cette phase test permet au patient de ressentir la stimulation à l’endroit où est localisée la douleur sachant que cette technique permet de réduire cette perception de l’ordre de 50 %, et parfois au-delà. Dans un deuxième temps, les extensions externalisée sont retirées et l’électrode est reliée directement au boîtier placé sous la peau », ajoute le chirurgien.
Pour quelles douleurs ?
« Ses indications sont les douleurs chroniques neuropathiques par atteinte du système nerveux périphérique (chimiothérapie, neuropathie diabétique, douleurs post-zona) ou les douleurs séquellaires après une opération du dos. L’autre indication est l’algodystrophie [enraidissement progressif d’une articulation, NDLR] quand les douleurs perdurent malgré le traitement médical», explique le Dr Belaid qui précise qu’elle n’est pas proposée en première intention mais quand les douleurs chroniques évoluent depuis plus de six mois à un an. Elle présente plusieurs avantages. « Cette technique est totalement réversible : si on arrête l’appareil ou si l’on retire l’électrode, il n’y a aucune lésion. On peut aussi ajuster et personnaliser les paramètres de stimulation en fonction des besoins du patient », précise le Dr Belaïd qui insiste sur la prise en charge conjointe par une équipe pluridisciplinaire : « La douleur a des conséquences psychosociales avec un syndrome dépressif réactionnel, des troubles anxieux, des troubles du sommeil, des ruptures au niveau professionnel et une réduction des activités sociales. Une prise en charge de toutes les composantes de la douleur doit donc se faire en parallèle. Elle est très importante pour optimiser le résultat postopératoire et améliorer la qualité de vie des patients. »
Une prise en charge totale
Un boîtier implantable de neurostimulation médullaire coûte entre 5 000 et 7 000 euros mais il est entièrement est pris en charge, comme l’ensemble de cette technique, par l’Assurance maladie si elle est remplit les conditions et les indications définies par la Haute Autorité de santé.